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Aluminium et acier: Québec aidera les plus petits joueurs de l’industrie


JULIEN ARSENAULT
La Presse canadienne
photo: AP Martin Meissner
Québec s’attend à ce qu’on sollicite très rapidement son enveloppe de 100 millions $ en prêts et garanties de prêts destinée aux plus petits joueurs de l’industrie de l’aluminium et de l’acier visés par les droits tarifaires aux États-Unis.

Alors que la relation commerciale canado-américaine s’est effritée au cours du week-end pendant le Sommet du G7, Mme Anglade a fait le point sur les tarifs pendant près de deux heures, avec une quarantaine d’acteurs de l’industrie ainsi que des représentants syndicaux, patronaux et des municipalités.

En mêlée de presse en compagnie du négociateur pour le Québec dans ce dossier Raymond Chrétien, Mme Anglade a expliqué que la situation actuelle est bien différente de celle du conflit du bois d’œuvre.

Malgré une cinquième dispute entre Ottawa et Washington dans ce dossier, l’industrie québécoise, qui a été en mesure de garder la tête hors de l’eau, n’a pratiquement pas eu besoin des 300 millions $ mis à sa disposition pour éponger les tarifs douaniers.

«Avec le bois d’œuvre, les hausses ont été refilées aux consommateurs, a dit la ministre de l’Économie, soulignant que l’annonce était une première étape. Dans ce cas-ci, nous savons déjà que les entreprises américaines ne veulent pas payer la surtaxe.»

Le Canada, le Mexique et l’Europe ne seront plus exemptés des droits d’importation de 25 % sur l’acier et de 10 % sur l’aluminium qui avaient été imposés pour la première fois en mars. Ottawa a répliqué en imposant des surtaxes sur des importations d’acier, d’aluminium et d’autres produits importés des États-Unis pouvant atteindre 16,6 milliards $ à compter du 1er juillet.

Selon l’Institut de la statistique du Québec, de 2016 à 2017, les exportations québécoises d’aluminium ont bondi de 27 % pour s’établir à 6,1 milliards $ — un sommet en près de 10 ans.

Contrairement aux producteurs primaires comme Rio Tinto, Alcoa et Aluminerie Alouette, qui exploitent neuf alumineries au Québec, les plus petits transformateurs n’ont pas tous les reins suffisamment solides pour absorber le tarif de 10 %.

Certaines de ces quelque 1400 petites et moyennes entreprises (PME) spécialisées dans la transformation affirment que de leurs clients américains ont déjà signalé qu’ils n’allaient pas assumer la facture supplémentaire découlant de la surtaxe.

Ottawa analyse toujours

La ministre de l’Économie, qui avait signalé ses intentions la semaine dernière dans le cadre d’un sommet sur l’aluminium qui se tenait à Montréal, a une fois de plus incité Ottawa à emboîter le pas pour aider l’industrie.

On analyse toujours la situation du côté du gouvernement Trudeau, a-t-on fait savoir, lundi, soulignant que l’on voulait déterminer quelle forme d’aide est la plus adéquate pour l’industrie.

À sa sortie de la rencontre à Mont­réal, le directeur québécois du syndicat des Métallos, Alain Croteau, a néanmoins estimé qu’il y avait urgence d’agir au niveau fédéral afin de s’assurer d’éviter des pertes d’emplois.

«Les industries se tiennent ensemble, mais il faut [qu’Ottawa] adopte des mesures concrètes rapidement, a-t-il dit, en réponse à une question. C’est dangereux ce qui s’en vient. Il faut trouver des moyens de régler le problème.»

Selon Mme Anglade, l’enveloppe de 100 millions $ devrait suffire à épauler les secteurs québécois de l’aluminium et de l’acier pendant quelques mois. Une autre rencontre est prévue la semaine prochaine entre Québec et le secteur privé.

«Le gouvernement pourra être plus agile et suivre l’évolution pour adapter les interventions aux besoins réels des entreprises», a estimé le président de l’Association de l’aluminium du Canada (AAC), Jean Simard, qualifiant la mesure de «bonne nouvelle».

Dans la foulée des commentaires virulents du président américain Trump à l’endroit du premier ministre Justin Trudeau, Raymond Chrétien, qui doit se rendre à Washington la semaine prochaine, n’a pas caché son inquiétude.

L’ancien ambassadeur canadien dans la capitale américaine, qui est le négociateur en chef du Québec dans le conflit du bois d’œuvre et la dispute sur le papier journal, a dit n’avoir jamais vu les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis se détériorer à ce point.

photo: AP Martin Meissner